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samedi 20 mars 2021

Les Parias, Tome 3 : Et Sarah se libéra de Minerva Spencer

 



 

Fille de missionnaires, Sarah Fisher a grandi dans la jungle africaine. Lors d'un raid sur son village, elle a été enlevée puis emmenée à bord d'un navire négrier, le Blue Bird. Lorsque celui-ci est attaqué par le corsaire Martin Bouchard, Sarah se retrouve face à cet ancien esclave marqué au fer dans sa chair et dans son âme. Arrogant, cruel et cynique, le capitaine Bouchard ne connaît pas la pitié et se comporte comme une brute. Sarah devrait le haïr, pourtant elle est irrésistiblement attirée...



Minerva Spencer est d'origine canadienne et vit au Nouveau-Mexique. Après avoir exercé différents métiers, elle écrit depuis 2013 de la romance historique.



Une belle romance portée

par des personnages haut en couleur.



Je n'ai pas lu les premiers tomes de la série. Les précédents personnages apparaissent mais on comprend très vite les liens entre eux. Cela ne m'a pas dérangée outre mesure.

De toute manière, le passé, l'histoire de Martin définissent la personne qu'il est et tout est explicite dès le départ. Il est véritablement hanté par ses origines et il vit en permanence avec une épée de Damoclès au dessus de la tête. C'est son origine d'esclave et les profonds stigmates qu'il ont laissés qui tendent l'arrière fond de l'histoire.



Ainsi quand Martin découvre Sarah, il ne voit pas une femme mais une personne qui est mêlée au commerce des esclaves. C'est à dire qu'il ne la voit pas. Elle est seulement un miroir qui le renvoie à tout ce qu'il exècre le plus.

Autant dire que leur histoire est mal partie. C'est sans compter sur notre héroïne qui tel un ange s'efforce de voir en chacun le meilleur et de le pousser vers la rédemption.

La tâche ne sera pas aisée et cela donne lieu a une très belle romance que je vous conseille.

L'accueil de cette série a été mitigé. Cela tient sans doute au personnage masculin et à la manière rude dont il traite l'héroïne. Je suis arrivée à passer outre car on voit très bien que c'est une bête blessée qui mord pour se protéger et ne pas être encore plus mis à terre.



Bref, Et Sarah se libéra ne va pas révolutionner le genre mais j'ai passé assurément un très bon moment de lecture.


Ces mots le ramenèrent brutalement sur terre. Il la déposa sur le banc à côté de lui. Elle semblait horrifiée. Quel idiot il avait été de croire qu’il pourrait un jour lui révéler la vérité !

Il eut un rire amer.

— Comment quelqu’un comme moi pourrait-il comprendre ce qui se passe dans la tête des gens convenables ? Convenables comme Graaf, ou comme d’Armand. Il vous tourne autour, lui aussi, n’est-ce pas ? Un trafiquant d’esclave et un propriétaire d’esclaves. Vous avez de nobles prétendants. Je vous demande humblement pardon de vous avoir touchée et d’attirer la honte sur l’honorable famille Fisher. J’espère que votre famille et vos amis n’apprendront jamais ce qui s’est passé. Je m’efforcerai d’effacer de ma mémoire ce fâcheux épisode.

Il fit claquer les rênes, et les chevaux repartirent.

— Je vous ramène. Votre place est auprès de Graaf. Vous vous ressemblez, vous êtes tous deux très convenables. Je vous souhaite d’être heureux ensemble.

Furieuse, Sarah lui donna un coup de poing sur l’épaule. Il ne s’y attendait pas, et les rênes lui échappèrent. La voiture fit un écart, les chevaux s’emballèrent.

— Vous êtes folle ! rugit-il.

Il dut bander ses muscles pour retenir les chevaux de crainte qu’ils ne renversent un cavalier qui croisait leur route. L’homme leva le poing.

— Bon sang, Sarah, vous avez failli nous tuer !

Le véhicule poursuivit sa course, effrayant les passants et leur attirant des cris de colère. Martin les ignora. Il lança un regard oblique à Sarah. Elle s’était réfugiée tout au bout du banc, au risque de basculer dans le vide.

— Vous êtes un porc insensible, vous traitez les femmes comme des objets. Graaf vaut mille fois mieux que vous. Lui se comporte comme un gentleman, et évite de blesser les gens qui l’entourent.

Martin laissa fuser un chapelet de jurons. Avait-elle oublié dans quelles circonstances elle avait connu le Hollandais ?

— Puisque vous l’estimez autant, vous devriez l’épouser.

— J’accepterai peut-être, la prochaine fois qu’il me le demandera.

Martin tira si fort sur les rênes que les chevaux dévièrent vers la gauche. Le cabriolet se retrouva face à un phaéton, causant une énorme frayeur au cocher. Si Martin réussit à retenir les chevaux et à les faire bifurquer à la dernière seconde, les roues des deux véhicules se frôlèrent.

— Il vous a demandé votre main ?

— Deux fois. Contrairement à vous, il ne traite pas toutes les femmes comme des gourgandines. Vous arrive-t-il parfois, ne serait-ce qu’une seconde, de penser à quelqu’un d’autre que vous ? Il ne vous a jamais traversé l’esprit que vos actes, vos visites dans les maisons closes pouvaient faire du mal aux personnes de votre entourage ?

Martin se concentra sur les chevaux et ne répondit pas. Le trajet se poursuivit en silence, les rues se succédant comme dans un brouillard. Lorsqu’ils atteignirent la rue où vivaient les oncles de Sarah, il s’était suffisamment ressaisi pour reprendre la discussion.

— Mes actes ? Et que dire des vôtres ? Vous êtes venue dans ma cabine, et vous m’avez supplié de coucher avec vous. Vous ne vous êtes pas plainte quand vous avez pris mon sexe dans votre main !

— Espèce de goujat !

Elle se jeta sur lui comme une furie, sous les yeux de deux valets abasourdis.

Martin lui agrippa les poignets.

— Ne vous inquiétez pas, lança-t-il aux valets. Mlle Fisher n’est pas elle-même aujourd’hui.

— Lâchez-moi !

Sarah parvint à se libérer, et sauta à terre. Sa robe s’accrocha au véhicule et la retint quand elle voulut gravir les marches du perron. Les deux valets se précipitèrent pour l’aider à se dégager, mais elle les repoussa et tira rageusement sur sa robe qui se déchira.

— Regardez ce que j’ai fait, à cause de vous ! Je ne pourrai jamais aimer un homme comme vous ! Retournez voir vos… vos filles de joie ! Je ne veux plus jamais vous voir ! Je vous déteste !

Elle monta les marches en courant et s’engouffra dans la maison.

Martin fixa la porte fermée. Devait-il la suivre ? Non, ce serait un désastre. Et que pourrait-il lui dire, de toute façon ?

Il s’éloigna lentement de la maison, étourdi. Comment cette journée qui avait si bien commencé avait-elle pu se transformer en un tel cauchemar ? Il soupira. Ainsi donc, elle le haïssait ?

Il était partagé entre le soulagement et le désespoir à l’idée de ne pas lui avoir avoué toute la vérité. C’était une chance qu’il ait su ce qu’elle ressentait vraiment pour lui avant de lui avoir fait des aveux pathétiques. Qui croyait-il tromper ? Il n’était pas un gentilhomme campagnard, mais un vulgaire corsaire. Sa place était sur un navire. Il avait d’ailleurs beaucoup aimé cette vie en mer avant que Sarah n’entre dans son existence. Il serait de nouveau heureux, il l’oublierait, même s’il devait passer dans les bras de toutes les prostituées de la terre. Il était riche, en bonne santé, et libre, que demander de plus ?