Ecoute
moi bien, fille...
Tu es la personnalité la plus forte de la famille, ma petite. Oublie ce que je t'ai dit la dernière fois. Je te prédis que la volonté de ton mari se brisera sur la tienne.
Tu es la personnalité la plus forte de la famille, ma petite. Oublie ce que je t'ai dit la dernière fois. Je te prédis que la volonté de ton mari se brisera sur la tienne.
Sous
son écharpe élimée et ses lunettes de myope, Ophélie cache des
dons singuliers : elle peut lire le passé des objets et traverser
les miroirs. Elle vit paisiblement sur l'arche d'Anima quand on la
fiance à Thorn, du puissant clan des Dragons. La jeune fille doit
quitter sa famille et le suivre à la citadelle, capitale flottante
du Pôle. A quelle fin a-t-elle été choisie ? Pourquoi doit-elle
dissimuler sa véritable identité ? Sans le savoir, Ophélie devient
le jouet d'un complot mortel.
Lecture
finie
J'entendais
parler de ce livre depuis des semaines. A chaque fois, il bénéficiait
d'une très bonne critique et c'est clairement cela qui m'a poussé à
lire ce livre.
Phélie
est une jeune fille aux dons particuliers qui lui permettent de lire
l'histoire de certains objets. Elle vit une vie paisible dans un
musée et son bonheur n'a besoin de rien d'autre. Mais voilà qu'elle
se retrouve mariée à un sauvage du Pôle sans qu'elle sache
vraiment pourquoi.
Chrsitelle
Dabos propose un univers singulier servi par une plume qui l'est tout
autant. Elle a un très beau style qui m'a fait pensée à certains
moments à Alessandro Barrico qui est un des mes auteurs favoris.
Pourtant
tout ça est très beau (et je ne vous parle pas de la couverture qui
est magnifique) mais je suis
restée hermétique à toute cette beauté. D'ailleurs, je
vous dirais que je je ne comprends. J'ai déjà eu cette sensation en
lisant cretains livres. Je voyais que le style, l'intrigue, les
personnages tout ce qui faisaient l’essence du roman était là.
Tout était réussi... mais le tout ne me touchait pas.
Pourtant
c'est ce que je recherche dans ma lecture : être captivé.
-
Bref -
Une
belle lecture mais la magie n'aura pas opéré sur moi.
– Vous
avez du sang sur votre main, dit-il.
Hébétée,
Ophélie contempla son gant de liseuse. Il lui fallut
plusieurs battements de paupières avant de comprendre ce que ce sang
faisait là. Elle se déganta et palpa sa joue. Elle sentit sous ses
doigts les contours d’une plaie à vif. Thorn ne l’avait pas
remarquée à cause de la livrée de Mime ; cette illusion absorbait
tout – taches, lunettes, grains de beauté – sous une peau
parfaitement neutre.
–
C’est
votre sœur, dit Ophélie en remettant son gant. Elle n’y est pas
allée de main morte.
Thorn
déploya ses longues jambes d’échassier et redevint
déraisonnablement grand. Tous ses traits s’étaient contractés
comme des lames de rasoir.
–
Elle
vous a attaquée ?
–
Tout
à l’heure, à la réception. Je ne lui ai pas libéré le passage
assez vite.
Thorn
était devenu aussi blême que ses cicatrices.
–
Je
ne savais pas. Je ne m’en suis pas rendu compte…
Il
avait soufflé ces mots d’une voix à peine audible, presque
humiliée, comme s’il avait failli à son devoir.
–
Ce
n’est rien, assura Ophélie.
–
Montrez-moi.
Ophélie
sentit tous ses membres se crisper sous sa livrée de valet. Se
déshabiller dans cette salle d’attente glaciale, juste sous le
grand nez de Thorn était la dernière chose dont elle avait envie.
–
Je
vous dis que ce n’est rien.
–
Laissez-moi
en juger.
–
Ce
n’est pas à vous d’en juger !
Thorn
considéra Ophélie avec stupeur, mais elle fut la plus étonnée des
deux. C’était la première fois de sa vie qu’elle haussait ainsi
le ton.
–
Et
qui donc, sinon moi ? demanda Thorn d’une voix tendue.
Ophélie
savait qu’elle l’avait froissé. Sa question était légitime ;
un jour, cet homme serait son mari. Ophélie inspira profondément
pour apaiser les tremblements de ses mains. Elle avait froid, elle
avait mal et, surtout, elle avait peur. Peur de ce qu’elle
s’apprêtait à dire.
–
Écoutez,
murmura-t-elle. Je vous suis reconnaissante de vouloir veiller sur
moi et je vous remercie pour le soutien que vous m’avez apporté.
Il y a toutefois une chose que vous devez savoir à mon sujet.
Ophélie
se fit violence pour ne pas se dérober aux yeux perçants de Thorn,
deux têtes plus haut.
–
Je
ne vous aime pas.
Thorn
demeura les bras ballants pendant de longues secondes. Il était
absolument inexpressif. Quand enfin il se remit en mouvement, ce fut
pour tirer sur la chaîne de sa montre, à croire que l’heure avait
soudain pris une extrême importance. Ophélie n’éprouva aucun
plaisir à le voir ainsi, figé contre son cadran, les lèvres tirées
en un pli indéfinissable.
–
Est-ce
à cause de quelque chose que je vous aurais dit… ou que je ne vous
aurais pas dit ?
Thorn
avait demandé cela avec raideur, sans détacher ses yeux de sa
montre. Ophélie s’était rarement sentie aussi mal au fond de ses
souliers.
–
Ce
n’est pas votre faute, souffla-t-elle dans un filet de voix. Je
vous épouse parce qu’on ne m’a pas laissé d’autre choix, mais
je ne ressens rien pour vous. Je ne partagerai pas votre lit, je ne
vous donnerai pas d’enfants. Je suis désolée, chuchota-t-elle
encore plus bas, votre tante n’a pas choisi la bonne personne pour
vous.
Elle
sursauta quand les doigts de Thorn refermèrent le couvercle de sa
montre. Il plia son grand corps sur un banc que la chaleur du poêle
avait commencé à dégivrer. Sa figure, pâle et creusée, n’avait
jamais été aussi vide d’émotions.
–
Je
suis désormais en droit de vous répudier. En avez-vous conscience ?
Ophélie
acquiesça avec lenteur. Par cet aveu, elle avait remis en question
les clauses officielles du contrat conjugal. Thorn pouvait la
dénoncer et se choisir une autre femme en toute légitimité. Quant
à Ophélie, elle serait déshonorée à vie.
–
Je
voulais vous parler en toute honnêteté, balbutia-t-elle. Je serais
indigne de votre confiance si je vous mentais sur ce point.
Thorn
fixa ses mains, appuyées l’une à l’autre, doigts contre doigts.
–
Dans
ce cas, je ferai comme si je n’avais rien entendu.
–
Thorn,
soupira Ophélie, vous n’êtes pas obligé…
–
Bien
sûr que je le suis, la coupa-t-il d’un ton cassant. Avez-vous la
moindre idée du sort qu’on réserve aux parjures, ici ?
Croyez-vous qu’il vous suffit de présenter des excuses à moi et à
ma tante, puis de rentrer chez vous ? Vous n’êtes pas sur Anima.
Gelée
jusqu’aux os, Ophélie n’osait plus bouger, plus respirer. Thorn
observa un long silence, le dos voûté, puis il redressa son
interminable colonne vertébrale pour la regarder en face. Ophélie
n’avait jamais été aussi impressionnée par ces deux yeux
d’épervier qu’en cet instant.
–
Ce
que vous venez de me dire, ne le répétez à personne si vous tenez
à votre peau. Nous allons nous marier comme convenu, et après, ma
foi, ça ne regardera que nous.
Quand
Thorn se leva, toutes ses articulations craquèrent à l’unisson.
–
Vous
ne voulez pas de moi ? N’en parlons plus. Vous ne souhaitez pas de
marmots ? Parfait, je les déteste. On jasera ferme dans notre dos et
puis tant pis.
Ophélie
était abasourdie. Thorn venait d’accepter ses conditions, si
humiliantes fussent-elles, pour lui sauver la vie. Elle se sentit
tellement coupable de ne pas répondre à ses sentiments qu’elle en
avait la gorge nouée.
–
Je
suis désolée…, répéta-t-elle piteusement.
Thorn
abaissa alors sur elle un regard métallique qui lui donna
l’impression qu’on lui plantait des clous dans le visage.
- Ne vous excusez pas trop vite, dit-il avec un accent encore plus dur qu’à l’accoutumée. Vous regretterez bien assez tôt de m’avoir comme mari.