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jeudi 18 septembre 2014

Le cercle des canailles Tome 3 : Le Paria de Sarah MacLean



Rien de ce que vous pourrez dire  
ne me fera vous pardonner.










 
La ruine d'une canaille...
On l'appelle le Duc Tueur, il est accusé d'avoir tué Mara Lowe qui s’apprêtait
à se marier. Dépourvu du moindre souvenir de cette nuit fatale, Temple règne désormais en maître sur les lieux les plus sordides de Londres depuis douze ans, fortuné et puissant, mais inaccessible à toute rédemption. Jusqu'à ce qu'une nuit, Mara réapparaisse et lui offre ce à quoi il aspire le plus... l'absolution.

Le retour d'un femme...
Mara avait prévu de ne jamais retourner dans ce monde qu'elle avait fui, mais lorsque son frère se noie dans les dettes qu'il dit au casino privé de Temple, elle n'a pas d'autre choix : elle propose un marché à Temple. Elle refera surface dans le monde pour prouver ce qu'elle est seule à savoir... qu'il n'est pas un tueur.

La révélation d'un scandale...
C'es un excellent marché, jusqu'à ce que Temple réalise que cette lady, ainsi que son passé, sont tout autres que ce qu'ils semblent. Il lui faudra faire preuve de toute sa force de volonté pour résister à l'attirance qu'il éprouve à l'égard de cette mystérieuse et exaspérante jeune femme, qui est bien décidée à prendre tous les risques pour l'honneur... et pour l'empêcher de s'ouvrir à l'amour.


 source: (Traduction everalice - BDP)






J'ai adoré !



Troisième opus du cercle des canailles et toujours un aussi bon moment.
Temple est le géant, le boxeur, la force de la nature du quatuor des canailles qui a été écarté de la bonne société aristocratique après qu'il est été retrouvé au petit matin dans le lit de sa future belle-mère et que le dit lit soit recouvert de sang. Pendant douze ans, il vivra avec la réputation du duc tueur.
Alors quand il retrouve Mara qui loin d'être morte comme tout le monde pense a refait sa vie sous une fausse identité, autant vous dire qu'il lui en veut en peu...
Le frère de la belle s'est ruiné au jeu et pire, il a dilapidé les économies de sa sœur. Celle-ci n'a d'autres solutions que de sortir de l'ombre pour retrouver son créancier et pseudo assassin.
Bon ! Les retrouvailles sont un peu tiré par les cheveux mais ça ne nuit pas au livre.

Les points forts

De beaux personnages !
Temple est juste un géant un peu rude à l'extérieur mais si TENDRE à l'intérieur. On en redemande ! Quant à Mara qui a tout de même gâché douze de la vie du bellâtre, on vit son parcours de rédemption avec beaucoup d'empathie.


Les points faibles

Je les ai évoqué au tout début. Les retrouvailles mais aussi les mensonges récurrents de l'héroïne. On a envie de lui dire de retenir la leçon et de ne pas recommencer les bêtises passées !


Une très belle romance historique




Temple, protesta-t-elle.
Attendez, murmura-t-il. Laissez-moi vous regarder.
Jamais il n’avait vu une telle beauté. Son regard la dévora – la cascade soyeuse des cheveux dans lesquels la lumière de la chandelle allumait des éclats fauves, les yeux bleu et vert que voilait un mélange de frustration et de désir, les lèvres déjà légèrement tuméfiées par ses baisers…
Il reprit sa bouche, avec le désir fou de graver dans sa mémoire le son de ses soupirs, le parfum de sa peau, le poids si léger de son corps contre lui, toutes choses si nouvelles pour lui…
À moins que…
Il écarta la tête de nouveau. Elle rouvrit les yeux.
Vous devriez vraiment arrêter d’arrêter, dit-elle avec un sourire.

Chez la couturière… commença-t-il, et aussitôt il souffrit de voir le voile de la sensualité déserter les yeux de la jeune femme. Ce que vous avez dit lorsque Mme Hébert vous a demandé de vous dévêtir…
Ce ne sera pas la première fois que vous me verrez en sous-vêtements.
Nous avons déjà fait cela, acheva-t-il.
Oui, dit-elle en baissant les yeux sur le tatouage qui ornait le bras de Temple.
Non. Ce ne pouvait être vrai. Il ne l’aurait pas oublié. Il se serait souvenu d’elle, de sa saveur, de ses gestes. De tout ce qu’elle était.
Il embrassa son cou puis le creux de sa clavicule, y plongea la langue, savoura le soupir qu’elle ne put retenir lorsqu’il desserra le lacet du corsage et glissa une main sous le tissu pour caresser l’extrémité d’un sein.
Pour le libérer.
Doux Jésus, il n’aurait pas pu oublier tant de perfection.
Il chercha son regard.
Nous avons déjà fait cela, n’est-ce pas ? répéta-t-il.
Elle hésita, et cette pause le frustra. Il ne supporterait pas qu’elle mente de nouveau.
Soudain, cela lui parut plus important que n’importe quoi d’autre. Il abaissa les épaisseurs de vêtements, laissant la robe sombre et la chemise crème découvrirune peau claire sur laquelle la lumière vacillante de la chandelle éveilla des éclats d’or.
William… souffla-t-elle.
Son véritable prénom.
Il s’immobilisa.
Comment m’avez-vous appelé ?
Elle hésita.
Je…
Personne ne l’avait appelé ainsi depuis plus d’une décennie. Même autrefois, peu de gens le faisaient. Seules les femmes qui partageaient son lit utilisaient son prénom, et il y prenait plaisir. Cela les rendait plus proches, plus accueillantes. Il se croyait aimé, pauvre idiot qu’il était.
Dites-le.
William.
Doux Jésus. Il avait déjà vécu cela.
S’il l’avait oublié, c’était qu’elle y avait veillé. Elle lui avait donc tout volé de cette nuit-là, même ce moment.
Il la relâcha comme si elle l’avait brûlé, et peut-être était-ce le cas. Peut-être le fait qu’elle l’ait privé du souvenir de cette nuit était-il la plus grave de ses fautes, maintenant qu’il pouvait apprécier le trésor dont sa mémoire avait été dépouillée.
Il se mit debout, et un léger vertige le prit. Il attendit une fraction de seconde avant de s’éloigner de quelques pas, furieux de l’effort que cela lui coûtait.
Que s’est-il passé d’autre cette nuit-là ?
Elle garda le silence.
Bon sang de bois.
Que s’était-il passé ? L’avait-il fait se déshabiller ? L’avait-il embrassée partout ? Lui avait-elle rendu la pareille ? S’étaient-ils donné du plaisir avant qu’il ne se réveille dans la peau du Duc Tueur et qu’il ne puisse plus jamais toucher une femme sans voir l’inquiétude envahir son regard ?
Ou bien Mara s’était-elle contentée de l’utiliser ? S’était-elle empressée de le droguer et de partir ?
La colère l’envahit comme une fièvre.
Nous nous sommes embrassés. Je vous ai vue en petite tenue. Et ensuite ? Avons-nous…
Elle se raidit, attendant qu’il achève la phrase avec le mot grossier qu’il avait osé prononcer chez la couturière.
L’avons-nous fait, oui ou non ? insista-t-il.
Je n’ai jamais rencontré d’aristocrate digne de confiance.
Seigneur… Lui avait-il fait du mal ?
À seize ans, elle était sans doute vierge. L’avait-il prise avec les ménagements nécessaires ?
Jamais à sa connaissance il n’avait couché avec une jeune fille vierge. L’avait-il fait cette nuit-là ?
Et si… L’orphelinat. Les garçons.
Était-il possible que l’un d’eux soit son fils ?
Son cœur s’affola.
Non. Elle n’aurait pas disparu comme une voleuse en emmenant son enfant. Ou bien si ?
Il lui jeta un coup d’œil.
Mara rajustait son corsage et arborait une expression sereine, comme s’ils étaient en train de deviser des débats au Parlement ou du temps hivernal.
Il revint auprès d’elle et s’arrêta à quelques centimètres.
Vous me devez la vérité, dit-il en se retenant difficilement de la secouer.
Pendant un instant, il vit quelque chose dans le regard de Mara. Elle y réfléchissait, comprit-il. Elle songeait à lui révéler la vérité.
Puis son regard changea. Et voilà… elle choisissait une autre tactique.
Lorsqu’elle parla, ce fut d’une voix assurée.
Nous avons passé un marché, Votre Grâce. Vous obtenez réparation et moi, mon argent. Si vous voulez la vérité sur cette nuit d’autrefois, je serai heureuse d’en négocier le prix.
Il en resta muet une seconde. Quelle audace ! Il n’avait jamais rencontré quelqu’un d’aussi effronté. Et, tout en mourant d’envie de la ligoter et de la harceler jusqu’à ce qu’elle réponde à ses questions, il admirait son sang-froid.
Il semble que vous ayez eu affaire à des canailles et que vous en ayez tiré de profitables leçons.
Vous seriez surpris de découvrir ce que douze années passées à devoir se débrouiller seule peuvent faire d’une femme, répliqua-t-elle avec aigreur.
Ils étaient debout, face à face. Mara faisait une adversaire plus à sa hauteur que beaucoup d’autres, songea Temple. Peut-être parce que tous les deux avaient connu la misère et l’angoisse. Peut-être parce que aucun d’eux n’avait l’habitude de faire confiance à autrui.
Je ne serais pas surpris du tout, admit-il.
Alors, vous êtes d’accord pour discuter de clauses supplémentaires ?
Il faillit accepter. Il faillit même annuler la dette de Christopher Lowe, rendre au frère et à la sœur leur argent, le domaine et les maisons de leur père, tout ce que celui-ci leur avait légué et que son imbécile de fils avait perdu.
Parce que, découvrit-il, ce qu’il souhaitait plus que tout, c’était se souvenir de cette nuit, la revoir, la revivre. Il le désirait plus que le droit de reprendre son nom. Plus que tout ce qu’il possédait.
Mais elle ne pouvait pas plus lui rendre la mémoire que lui rendre les années perdues.
Tout ce qu’elle pouvait lui donner était la vérité.
Et il l’obtiendrait.


L'extrait :
Où est-elle ? demanda-t-il à Lydia.
Je ne sais pas. Elle ne l’a pas dit.
Quand reviendra-t-elle ?
Elle baissa les yeux, et il entendit la réponse avant qu’elle ne la prononce.
Jamais.
Il se retint avec peine de hurler, de maudire la sottise des femmes et le destin cruel qui s’acharnait sur lui.
Pourquoi, pourquoi, pourquoi ? gémit-il.
Pour nous. Elle pense que nous nous en sortirons mieux sans elle.
Les garçons ont besoin d’elle ! Vous avez besoin d’elle ! Cet endroit a besoin d’elle !
Lydia le regarda avec un sourire entendu.
Vous ne comprenez pas. Elle pense que, pour vous aussi, c’est mieux.
Elle a tort.
Je suis d’accord. Mais elle croit que, désormais, aucun aristocrate ne confiera son fils à quelqu’un dont le passé est aussi noir que le sien. Que personne ne donnera d’argent à un orphelinat dirigé par une menteuse. Et qu’aucun duc ne réintégrera la société avec une femme déchue sur les bras.
Merde à la société !
Bien dit, commenta Lydia sans se choquer du mot grossier.
Comment avez-vous fait sa connaissance ? demanda-t-il abruptement, tant il désirait en savoir plus sur la femme qu’il aimait.
Seigneur… il aurait dû le lui dire. Peut-être, se sachant aimée, serait-elle restée.
C’est une longue histoire, prévint Lydia.
Racontez-la-moi.
Il y a une maison dans le Yorkshire. Un endroit où peuvent se réfugier les femmes qui veulent changer de vie. Des filles et des sœurs brimées. Des épousesbrutalisées. Des prostituées lasses de leur métier. Dans cette maison, on leur offre une seconde chance.
Temple acquiesça de la tête. Il avait entendu parler de ce genre d’endroit. Les femmes n’étaient pas toujours traitées comme elles le devaient, quel que fût leur milieu. Il pensa à la mère de Mara, poignardée par son mari. À Mara elle-même, battue et promise à un homme trois fois plus âgé qu’elle.
Il l’aurait protégée.
Sauf qu’il n’en aurait pas eu la possibilité. Elle se serait retrouvée mariée, et lui serait retourné à l’université dès le lendemain du mariage.
Et il aurait haï son père pour avoir épousé la femme de ses rêves.
Mara était là depuis plusieurs années lorsqu’on lui a proposé de revenir à Londres pour ouvrir l’orphelinat MacIntyre, poursuivait Lydia. Moi, cela faisait moins d’un an que j’étais là. À l’entendre parler du projet de cette maison, j’ai compris qu’il ne s’agissait pas seulement pour elle d’accueillir des enfants, mais d’une tâche plus importante… Je pense qu’elle essayait de compenser le mal qu’elle avait fait à un jeune garçon de l’aristocratie en en aidant deux douzaines d’autres à sortir de la médiocrité à laquelle les condamnait leur naissance, ajouta-t-elle en regardant Temple dans les yeux.
C’était évident. Et ces garçons étaient devenus ce qui comptait le plus pour elle.
Lorsqu’il la retrouverait, il achèterait un domaine avec des chevaux, des jouets, d’immenses pelouses où les garçons pourraient courir et se développer sainement, et où chacun aurait la vie qu’elle rêvait de lui donner.
Mais d’abord, cette chance, il la lui donnerait, à elle.
Je lui ai demandé de m’épouser, annonça-t-il.
Oh ! fit Lydia en écarquillant les yeux.
Je lui ai offert d’être ma duchesse, de lui donner tout ce qu’elle voulait. Et elle a fui.
Elle n’a rien pris.
Que voulez-vous dire ?
Elle a dit qu’elle ne pouvait plus vous prendre quoi que ce soit. Elle a tout laissé. Les vêtements, la cape, les gants.
Il revit Mara déchirant le chèque qu’il lui avait donné. Les fonds dont l’orphelinat avait tant besoin et qu’elle avait gagnés grâce à leur marché stupide.
Elle n’a pas d’argent.
Quelques shillings, c’est tout.
Dire que je lui ai offert de quoi vivre sans souci plusieurs années de suite. Une fortune !
Lydia secoua la tête.
Elle n’aurait rien accepté de vous. Pas maintenant.
Pourquoi ?
Vous ne comprenez rien aux femmes amoureuses, n’est-ce pas ?
Amoureuse.
Si elle était amoureuse, elle ne m’aurait pas quitté, voyons !
Au contraire, Votre Grâce, expliqua Lydia. C’est parce qu’elle vous aime qu’elle est partie. Pour elle, ce qui compte, c’est votre patrimoine.
Une épouse. Des enfants. Un patrimoine. Il lui en avait parlé, et elle l’avait cru.
Tout ce que je veux, c’est elle.
Eh bien, voilà qui est clair, commenta Lydia avec un sourire.



L'extrait :
Que voulait-il d’elle, à présent ? Il ne le savait plus.
J’étais nu, Mara. Je me souviens de vos cheveux dénoués. De votre torse penché sur moi.
Elle rougit, et il sut ce qu’il voulait. Il monta sur la petite estrade en évitant de la toucher.
Est-ce que nous avons…
Excusez-moi, Votre Grâce.
Un moment, madame Hébert, dit-il sans regarder la couturière.
La Française fit demi-tour sans discuter.
Il enlaça Mara et l’attira à lui. Les torses se soudèrent, les cuisses se touchèrent. Elle lâcha un petit cri, mais il n’entendit aucune peur dans sa voix.
Doux Jésus, elle n’avait pas peur de lui. Depuis quand n’avait-il pas tenu dans ses bras une femme qui ne le craignait pas ?
Depuis qu’il l’avait tenue, elle.
Est-ce que nous l’avons fait, Mara ? chuchota-t-il à son oreille.
Et il ne put se retenir de lui mordiller le lobe, ce qui la fit frissonner de plaisir.
Pas de peur.
Est-ce que nous avons baisé ?
Le mot ordurier la fit se crisper, et il refoula un stupide sentiment de honte.
Puis elle tourna la tête et lui rendit la pareille. Pressant les lèvres sur son oreille, elle l’embrassa une fois, deux fois doucement avant de le mordre. Le désir le traversa. Grands dieux, il la désirait plus qu’il n’avait jamais désiré personne, et ce bien qu’il la sût aussi dangereuse qu’un serpent venimeux.
Si je vous le dis, cesserez-vous ce jeu ? Effacerez-vous la dette ?
Il n’avait jamais eu adversaire plus séduisant, ni plus habile.
Car, un instant, il songea à acquiescer. À tout effacer et à la laisser se sauver. Et peut-être l’aurait-il fait si elle avait pu lui rendre la mémoire.
Mais de cela aussi, elle l’avait dépouillé.
Oh, Mara, dit-il en la lâchant avec quelque chose qui ressemblait vaguement à de la déception. Rien de ce que vous pourrez dire ne me fera vous pardonner.


L'extrait :
Bouleversé, il songea qu’il aurait donné tout ce qu’il possédait en échange d’une nuit avec cette femme.
Mais l’avait-il déjà eue ?
L’idée le glaça. Son désir se mêla de haine, de fureur, de dépit.
Dites-moi… Avons-nous déjà fait ceci ? Avons-nous été…
Amants.
Un instant, il crut qu’elle allait répondre. Il lui sembla voir de la sympathie dans son regard. Non, de la pitié. Il ne voulait pas de sa pitié. Elle lui avait volé cette nuit et refusait de la lui rendre.
Puis le regard de Mara reprit son expression habituelle, et il sut ce qu’elle allait dire.
Répondez-moi !
Vous connaissez le prix de cette information.
En d’autres circonstances, songea Temple, il aurait trouvé cette femme parfaite sur tous les plans. Son intransigeance était admirable. Son audace aussi.
Mais c’étaient ces mêmes qualités qui l’avaient poussée à le droguer lors de leur première rencontre. Puis de la deuxième. Ces mêmes qualités qui avaient fait que, pendant douze ans, elle n’avait pas cherché à l’innocenter.
Et c’étaient ces qualités qui, certainement, la dresseraient de nouveau contre lui.
Mais, cette fois-ci, il était dans son sanctuaire.
Et jamais il n’avait été aussi exaspéré.
Si l’orphelinat disparaît, madame MacIntyre, une formidable carrière de putain vous attend.
Elle s’immobilisa une demi-seconde, telle une biche aux abois, puis sa main se leva et atterrit avec une précision remarquable sur la joue de Temple.
Il ne chercha pas à l’éviter. Il prit la gifle comme un dû. Avec le sentiment d’être le pire des imbéciles. Il n’aurait pas dû dire cela. Jamais il n’avait insulté une femme à ce point. L’excuse était presque sur ses lèvres lorsqu’une cloche sonna au-dessus de la porte menant au ring.
Qu’est-ce que c’est ? demanda-t-elle d’une voix étrangement atone en laissant retomber sa main.
Doux Jésus, que leur était-il arrivé ?
Il se détourna, en s’interdisant de toucher sa joue sur laquelle, très certainement, s’épanouissait une fleur rouge.
Mon adversaire est prêt, dit-il. Nous reprendrons cette discussion après le combat.
Elle inspira et lâcha :
  • J’espère qu’il va gagner.
L'extrait :
Pour prendre vos mesures, mademoiselle, j’ai besoin que vous soyez le moins vêtue possible. Si c’était l’été et que vous ne portiez qu’une robe légère…
La couturière n’avait pas besoin de poursuivre ; on était fin novembre et, le froid sévissant déjà, la robe et la chemise de Mara étaient en laine.
Retournez-vous, dit-elle à Temple, en posant les mains sur ses hanches.
Non.
Je ne vous ai pas accordé l’autorisation de m’humilier.
Mais je l’ai achetée, riposta-t-il en s’affalant un peu plus dans le canapé. Détendez-vous. Mme Hébert a très bon goût. Laissez-la vous draper de soie et de satin, et laissez-moi payer.
Vous croyez que trois livres vont me rendre plus malléable ?
Je ne crois pas que vous puissiez jamais être malléable. Mais j’attends que vous teniez parole. Et rappelez-vous qu’à la fin, vous aurez une douzaine de robes neuves.
Un gentleman respecterait ma pudeur.
Je suis un vaurien, d’après la rumeur.
Nul doute que, lorsque je vous connaîtrai un peu mieux, je vous donnerai un nom bien pire.
Il rit de bon cœur, d’un rire sonore dont le son riche et chaud émut Mara malgré elle.


L'extrait :
Nous n’avons jamais… Nous avons commencé mais sans aller jusque-là.
Il ferma les yeux et inspira profondément. Elle s’arma de courage.
Je n’aurais jamais dû vous laisser croire que nous l’avions fait, ajouta-t-elle.
Encore un mensonge, alors.
Elle hocha la tête. Elle voulait tout lui dire, et en particulier que, cette nuit-là, s’ils n’avaient pas été intimes, il l’avait fait rire et que, pour la première fois de sa vie, elle s’était sentie belle et désirable. Pour la dernière fois aussi.
Daniel, dit-il.
Daniel ? répéta-t-elle sans comprendre.
Ce n’est pas mon fils.
Je ne comprends pas, fit-elle, surprise.
Vous avez dit qu’il était avec vous depuis le début.
Daniel avec ses cheveux noirs, ses yeux bleus, et l’âge correspondant.
Elle ferma les yeux. Voilà ce qu’il avait cru. Un fils issu de cette nuit. Elle l’avait blessé, de nouveau. Sans le vouloir, cette fois-ci. Les yeux embués, elle fit non de la tête.
Depuis que j’ai créé l’orphelinat. Oui. Mais il n’est pas…
Il l’interrompit d’un rire amer.
Bien sûr, puisque nous n’avons pas fait l’amour !
Il se redressa et s’éloigna en lui tournant le dos.
Juste une fois, je voulais que vous me disiez la vérité. Que vous me donniez une raison de croire que vous êtes autre chose qu’une femme avide de sang et d’argent.
Elle devait tout lui dire.
L’histoire entière.
L’argent, les dettes, sa fuite. Elle devait se jeter à ses pieds et lui donner la possibilité de lui pardonner. De la croire. De croire en elle.
Peut-être alors pourraient-ils repartir de zéro, et ensuite… Doux Jésus, elle voulait cela plus que n’importe quoi.
Je ne cherchais pas le sang, dit-elle en se relevant sans se soucier de sa nudité. Ni l’argent, d’ailleurs. Laissez-moi vous expliquer.
Non.
Il se retourna, et sa main battit l’air entre eux.
Elle s’immobilisa.
Non, répéta-t-il. Je suis las de vos mensonges, de vos jeux, de vouloir y croire. C’est fini.
Elle ramassa sa robe. Elle avait mérité cette rebuffade. Depuis douze ans, elle savait qu’un jour elle aurait à affronter cet homme et à assumer les conséquences de ses actes. Mais elle n’avait pas prévu qu’elle souffrirait de le perdre. Elle n’avait pas prévu qu’elle s’attacherait à lui à ce point.
S’attacher… Quel mot tiède en comparaison de l’émotion qui faisait battre son cœur tandis qu’elle regardait cet homme lutter contre ses démons, les démons qu’elle avait envoyés à ses trousses.
Peu m’importe vos raisons, bonnes ou mauvaises. Dites-moi seulement combien je vous dois pour cet après-midi.
Les mots la heurtèrent. Il croyait qu’elle demandait à être payée pour cela ? Eh bien, oui. N’était-ce pas le marché qu’ils avaient conclu ? Aucun des instants passés ensemble n’était gratuit.
Elle secoua la tête.
Ah bon ? Notre marché n’est plus digne de vous, maintenant ?
Elle n’en voulait plus, de ce marché. Elle ne voulait plus que Temple.
Et, subitement, comme sous l’effet d’une gifle en pleine figure, elle comprit pourquoi.
C’était tout simple : elle l’aimait.
Et le pire était qu’il ne le croirait sans doute pas. Il y verrait une énième ruse.
Elle essaya cependant :
William, s’il vous plaît.
Arrêtez. Ne m’appelez plus ainsi, vous n’en avez pas le droit.
Bien sûr. En le dépouillant de la vie qui lui était due, elle lui avait volé son nom. Les larmes affluèrent, mais elle les refoula de peur qu’il n’y voie une comédie de plus.
Bien sûr, fit-elle avec un hochement de tête.
Demain, tout sera fini entre nous. Vous montrerez votre visage, vous me rendrez mon nom. Nous ferons les comptes et je vous donnerai votre argent, puis vous disparaîtrez de ma vie.
Il enjamba les cordes du ring et quitta la salle sans se retourner.
Elle attendit que la porte se soit refermée pour laisser les larmes ruisseler.