Moi
c’est Café…
euh, Charley.
Vous
savez, ces mauvaises choses
qui arrivent aux gens bien ?
C’est
moi.
Moi
c’est Café… euh, Charley. Et il me faut plus de café. Le
sommeil c’est l’angoisse : Reyes, le fils du Diable chaud comme
l’enfer que j’ai emprisonné pour l’éternité, hante mes
cauchemars. Je crois qu’il me hait. Mais est-ce que les criminels
accepteraient de me laisser tranquille le temps que je règle ça ?
Bien sûr que non. Un type veut que j’enquête sur sa femme
disparue… sauf que je suis sûre que c’est lui qui a fait le
coup. Si j’arrive à m’injecter le café en intraveineuse, je
devrais pouvoir le prouver. Sauf si mon grincheux de père revient à
la charge pour me faire changer de métier parce que détective
privée c’est trop dangereux.
Bon
d’accord, je manque de me faire tuer une fois par semaine, mais
c’est pas une raison.
Je suis super comme détective…
et comme
Faucheuse !
Café ?
Tout
simplement génial !
L'intrigue
ici s'emballe. Reyes et Farrow ont une vrai « relation ».
Tout
est exacerbé. Charley est attirée par son beau ténébreux autant
qu'elle le craint. Rien de nouveau sous le soleil, vous me direz, oui...mais ici on atteint un zénith qu'on ne connaissait auparavant.
Et
quel zénith !
Reyes
ne prête plus uniquement main forte à Charley mais il décide de
prouver son innocence. Il s'y prend bien mal comme en témoigne la
fin du livre.
Bonne mise en appétit.
A
dévorer sans modération !
Reyes
Alexander Farrow, le fils de Satan à moitié humain et à moitié
top-modèle, apparut derrière moi, ses puissantes épaules luisant
tandis que de la vapeur s'élevait autour de lui, donnant
l'impression qu'il venait juste de sortir de l'enfer. Ce n'était pas
le cas, évidemment. Il s'en était échappé des siècles plus tôt
et il était furieux contre moi, à l'heure actuelle, pour avoir lié
son corps éthéré à son corps physique. Mais cela n'atténuait pas
du tout l'effet de son arrivée.
Je
plissai les yeux pour le voir plus clairement.
—Qu'est-ce
que tu fais ici ?
Il
baissa la tête, et ses yeux noirs me transpercèrent d'un regard
furieux. Quel crétin ! C'était M A salle de bains !
Mais
je l'avais emprisonné en liant son corps éthéré à son corps
physique. Il n'était pas censé être là. Comment était-ce
possible ?
—Tu
m'as invoqué, répondit-il d'une voix grave teintée d'animosité.
— C'est
impossible, répondis-je en secouant la tête.
Il
passa un bras par-dessus mon épaule et appuya la main contre le mur
devant moi. Pour se rendre plus imposant. Pour mieux me dominer, me
faire savoir que j'étais prise au piège. Il pressa son corps mince
contre mes fesses et appuya son autre main sur le mur à ma droite,
m'emprisonnant complètement.
Son
regard dur captura le mien.
—Pourquoi
est-ce impossible ? Parce que tu m'as enchaîné comme un chien à sa
niche ?
Oh,
ouais, il était furax.
—Tu
ne m'as pas laissé le choix, lui rappelai-je d'une voix tremblante,
beaucoup moins assurée que je l'aurais voulue.
Il
baissa la tête jusqu'à ce que sa bouche soit près de mon oreille.
—Toi
non plus, tu ne me laisses pas le choix.
Ses
traits se durcirent. Son regard s'étrécit tandis qu'il me
contemplait dans le miroir. Sous ses cils épais, ses yeux étaient
voilés par la passion.
J'étais
incapable de détourner la tête. Il était si beau, si mâle. Quand
il m'entoura de son bras et glissa la main dans mon bas de pyjama,
j'attrapai son poignet.
—Attends,
dis-je, haletante. Je ne comprends toujours pas comment tu peux être
ici.
—Je
te l'ai dit, tu m'as invoqué.
Malgré
tous mes efforts, ses doigts se faufilèrent entre mes jambes. Je
laissai échapper une exclamation lorsqu'ils s'enfoncèrent en moi.
—Tu
m'as toujours invoqué. Tu as le pouvoir de m'appeler quand tu veux
ou quand tu as besoin de moi, Dutch. Tu n'as pas encore compris ça ?
Je
luttai contre les sensations délicieuses qui montaient dans mon
abdomen à chacune de ses caresses. Je luttai pout comprendre la
signification de ces mots qu'il me soufflait à l'oreille.
—Non,
tu es toujours venu à moi quand j'avais besoin de toi, quand j'étais
en danger.
C'était
vrai. En grandissant, il était venu à chaque fois que ma vie avait
été menacée.
Son
souffle me balaya la joue. Sa chaleur me brûla tandis que sa bouche
cherchait mon pouls sur ma gorge.
—Non,
c'est toujours venu de toi.
Il
se trompait. C'était obligé. L'idée que je puisse l'invoquer, que
je l'avais toujours fait, était impensable. Un mois plus tôt, je ne
savais même pas qui il était et j'avais même peur de lui, cet être
ténébreux fait d'ombre et de fumée. Me retrouver en sa présence
était la dernière chose dont j'avais eu envie, alors comment
aurais-je pu l'invoquer? Ce qu'il suggérait était impossible.
—Mais
puisque je suis là...
Sans
terminer sa phrase, il me coinça contre lui et, d'un seul geste, fit
descendre mon bas de pyjama et ma culotte. Puis, l'ombre d'un sourire
au coin de sa magnifique bouche, il m'écarta les jambes et me
pénétra d'un seul coup de rein. Je laissai échapper une
exclamation. Le tourbillon qui s'était formé à peine quelques
minutes plus tôt se transforma aussitôt en ouragan. D'une main,
j'agrippai son poignet sur ma gorge et, de l'autre, je m'accrochai à
ses fesses musclées pour l'enfoncer plus profondément en moi, en le
griffant pour atteindre la délivrance.
J'ouvris
les yeux et je le regardai dans le miroir, épiant ses réactions.
Ses lèvres légèrement entrouvertes. Ses sourcils froncés. Le
tombé de ses cils.
—Dutch,
me dit-il de sa voix grave et douce, comme s'il était impuissant
face à ce qu'il s'apprêtait à faire.
Au
bord de l'orgasme, il serra les dents, souleva l'une de mes jambes
contre le meuble du lavabo et s'enfonça en moi, encore et encore,
presque violemment, me cajolant avec chaque coup de rein, chaque
poussée puissante.
Le
courant à l'intérieur de moi devint plus fort. L'érection de Reyes
comblait un besoin si profond, si viscéral, qu'il dévorait chaque
centimètre de mon être. Le désir à l'état brut qui restait en
retrait au loin se précipita pour s'accumuler entre mes jambes. Il
enfla comme une vague, en m'aspirant et en m'attirant plus près
encore du bord.
J'enfonçai
mes ongles dans le poignet de Reyes en me rappelant brusquement qu'il
ne voulait pas être là, avec moi. Pas après ce que j'avais fait.
— Reyes,
attends.
Je
sentis la jouissance au moment où elle s'emparait de lui, faisant
trembler et convulser son corps. Aussitôt, une explosion me
traversa, envoyant une vague de plaisir intense à l'assaut de mes os
et de mes veines. L'extase bouillante me brûla la chair.
L'extrait :
Le
siphon émit des gargouillis tandis que l'eau clapotait à mes pieds.
Je sentis quelque chose de solide à cet endroit et baissai lentement
la serviette. Une chaleur caractéristique s'éleva telle de la
vapeur autour de mes jambes, et Reyes se matérialisa devant moi, ses
épaules puissantes ruisselant d'eau. Il referma sa main sur ma gorge
et m'appuya contre le froid carrelage mural, complètement à
l'opposé de la température brûlante qui émanait de son corps. Son
visage paraissait dur et implacable.
Mais,
avant que je puisse dire quoi que ce soit, le désir, familier,
s'empara de moi. Je m'armai de courage pour lutter, mais c'était
comme vouloir endiguer un tsunami avec une fourchette en plastique.
Reyes se rapprocha de moi et riva son regard sur le mien. Ses yeux
marron foncé semblaient presque inquisiteurs sous ses cils.
Je
le sentis écarter mes jambes avec son genou.
—
Qu'est-ce
que tu fais ? protestai-je en hoquetant de stupeur lorsque sa
chaleur pénétra jusqu'au plus profond de mon être.
Sans
répondre, il me prit la serviette des mains et la jeta de côté.
— Reyes,
attends. Tu n'as pas envie d'être là. (Je posai mes mains à plat
sur son torse.) Tu ne veux pas faire ça.
Il
se pencha jusqu'à ce que ses lèvres pleines soient pratiquement sur
les miennes.
— Pas
plus que toi, répondit-il en me mettant au défi d'argumenter.
Son
souffle était comme une caresse de velours sur ma bouche. Il sentait
l'orage, la terre, l'ozone et l'électricité. Il leva une main pour
emprisonner mon menton et glissa l'autre entre mes jambes. Mon
estomac bondit à ce contact. Le centre de mon être était si
sensible à ses caresses que je faillis jouir instantanément.
On
frappa à la porte de la salle de bains. Je me tournai dans cette
direction en fronçant les sourcils.
—Pas
encore, me dit-il d'un ton menaçant en plongeant ses doigts en moi
pour me ramener à lui.
Je
laissai échapper une exclamation de stupeur et lui agrippai le
poignet pour le repousser. Au lieu de quoi, j'enfonçai ses doigts
plus profondément encore et le griffai en le suppliant d'aller
jusqu'au bout.
Il
pressa son corps d'acier contre le mien et se pencha jusqu'à
m'effleurer l'oreille de sa bouche.
— Reste
avec moi, me dit-il d'une voix profonde, riche et suave.
Il
me libéra le menton, prit l'une de mes mains et la fit descendre le
long de son abdomen musclé.
On
frappa de nouveau, et je me sentis arrachée à lui.
—Dutch,
me dit-il au moment où ma main se refermait sur son érection.
Mais
de l'eau jaillit autour de nous comme une inondation, jusqu'à ce que
je me retrouve littéralement en train d'étouffer.
En
me rappelant brusquement où j'étais, je me redressai d'un bond et
projetai l'eau du bain par-dessus le rebord de la baignoire.
J'entendis
une voix m'appeler.
-—Tout
va bien ?
C'était
Amber.
—Qu'est-ce
qu'il y a, chérie ? demandai-je en essuyant l'eau sur mon visage. Je
ne t'ai pas entendue.
—Je
rentre à la maison. Mon portable n'a plus de batterie et je dois
rappeler Samantha. Son petit copain l'a plaquée. Apparemment c'est
la fin du monde.
J'avais
du mal à reprendre mon souffle.
—
D'accord,
ma chérie. On se voit demain, dis-je d'une voix trop voilée.
— D'ac.
Je
m'obligeai à me calmer et à desserrer les poings pour lâcher la
serviette trempée que j'avais fait tomber dans la baignoire à un
moment donné. Puis je me redressai tout doucement et posai le menton
sur mes genoux en attendant que la tempête qui me faisait trembler
s'apaise.
Ça
devenait ridicule. Si je l'avais entravé, comment pouvait-il
continuer à envahir mes rêves ? Ça rimait à quoi, tout ce bordel
? Sans parler du fait que je m'étais endormie dans mon bain.
J'aurais pu me noyer.
Satané
fils de Satan.
L'extrait :
Dès
qu'il fut rentré dans la supérette, je me tournai vers Reyes.
Consciente de sa douleur à présent, je la sentais l'assaillir sous
forme de vagues brûlantes. Je luttai de nouveau contre l'empathie
qui menaçait de vaincre mon humeur globalement massacrante.
—Que
s'est’il passé ? demandai-je en désignant le sang.
—Toi.
— Moi ?
répétai-je, surprise.
Reyes
baissa son arme et se renfonça un peu plus dans le siège passager.
—Tu
t'es endormie.
Oh
merde, c'était vrai.
— Mais
quel est le rapport avec... ?
—
Apparemment,
à chaque fois que tu t'endors, tu m'attires vers toi.
— Alors,
c'est ma faute ? C'est moi qui fais ça ?
Il
posa sur moi ses yeux voilés par la douleur.
—Je
suis entravé. Je ne peux plus venir à toi maintenant si tu ne
m'invoques pas.
— Mais
je ne le fais pas exprès. (Je me sentais très gênée, tout à
coup.) Attends, quel rapport avec ta blessure ?
— Quand
tu m'invoques, c'est comme avant. Je plonge dans un état
cataleptique.
— Oh.
—Un
conseil. Évite les crises de catalepsie quand tu essaies d'échapper
aux mâchoires d'un camion-poubelle.
—Oh.
Oh ! Oh, mon Dieu. Je suis tellement... Attends un peu, pourquoi
est-ce que je te fais des excuses, là ? Tu t'es échappé. D'une
prison de haute sécurité. Dans un camion poubelle ?
—Je
te l'ai dit. Ils refusaient de me laisser sortir.
Il
posa la tête contre l'appuie-tête et ferma les yeux. La douleur qui
parcourait tout son corps l'épuisait.
—Allons-nous-en.
—Pourquoi
tu ne te contentes pas de prendre ma Jeep ? lui demandai-je au bout
d'un long moment.
Un
sourire malicieux apparut sur son visage.
— C'est
ce que je fais.
—Sans
moi à l'intérieur.
—Pour
que tu coures tout raconter au caissier ? Je ne crois pas, non.
—Je
ne dirai rien à personne, Reyes. Je le jure. Pas âme qui vive.
Il
rouvrit les yeux en soupirant et me regarda. Il était si beau. Si
vulnérable.
—Tu
sais ce que j'aurais fait si ce type avait compris ce qui se passait
?
Je
baissai la tête sans répondre. Peut-être pas si vulnérable que
ça, finalement.
—Je
ne veux blesser personne, ajouta-t-il.
— Mais
tu le feras, si c'est nécessaire.
—
Exactement.
Je
tournai la clé de contact et m'engageai sut l'autoroute.
—Où
on va ?
—A
Albuquerque.
Cette
réponse m'étonna. J'aurais misé sur le Mexique. Ou l'Islande.
—Qu'est-ce
qu'il y a, à Albuquerque ?
—Mon
salut, répondit-il en refermant les yeux.
L'extrait :
— Sainte
merde, Charley, murmura-t-elle d'une voix tremblante, c'était Reyes
Farrow.
—Je
sais. Je suis désolée, il s'est pointé à l'improviste.
—Je
crois que je viens d'avoir un orgasme. Je ne pus m'empêcher de
glousser.
—Tu
l'as juste regardé !
—Justement.
Tu as vu ses épaules ? me demanda-t’elle.
— Oui,
pouffai-je. Ne t'inquiète pas, tu vas récupérer l'usage de tes
jambes dans un instant.
—Et
ses avant-bras ! Pour l'amour du ciel, qui aurait cru que des
avant-bras puissent être aussi sexy ?
—Ça
arrive aux meilleures d'entre nous.
— C'est
juste qu'il est tellement...
—Je
sais.
—Et
tellement...
—Ça
aussi, je le sais. C'est peut-être à cause de cette histoire de «
fils de Satan ».
—Ouais,
peut-être.
Je
l'aidais à s'asseoir sur son canapé. Amber revint en courant.
—Je
peux le prendre en photo avec mon téléphone avant de partir à
l'école?
L'extrait :
Walker
se pencha sur moi et tapota la coupure sur ma cuisse. Puis il me
regarda droit dans les yeux. J'avais du mal à focaliser ma vision,
mais il fronçait les sourcils d'un air inquisiteur.
— Reyes,
dit-il, ce qui me fit revenir à lui en clignant des yeux. Tu es
comme lui. Tu guéris comme lui. (Il appuya le scalpel sur ma joue,
prêt pour sa prochaine entaille.) Qu'est-ce que vous êtes ?
Il
n'attendit pas longtemps la réponse. Très vite, du sang ruissela
dans ma bouche et à l'intérieur de ma gorge. J'essayai de le
recracher, mais pour cela, il aurait fallu que je desserre les dents,
un risque que je n'étais pas prête à courir.
—Je
me demande ce qui arriverait, dit-il en détachant de force ma main
de la chaise, si je prenais un doigt.
Juste
au moment où il commençait à joindre le geste à la parole - la
piqûre vive du métal tranchant la chair devint insupportable
lorsqu'elle atteignit l'os -, on entendit tous les deux quelqu'un
gravir l'escalier en courant.
—Enfin
! s'exclama le monstre. (Il se tourna vers moi en souriant.) C'est
notre petit détenu en cavale, tu ne crois pas ?
Un
demi-battement de cœur plus tard, la porte s'ouvrit à la volée, et
la silhouette d'un grand type costaud apparut dans l'encadrement de
la porte.
Reyes.
Non.
Avant
que j'aie eu le temps de dire ou de penser quoi que ce soit, le coup
de feu partit. Walker n'attendait que ça, il savait que Reyes allait
venir. Je fermai les yeux et stoppai la rotation de la Terre sur son
axe.
Quand
je les rouvris, la balle était suspendue dans les airs entre Walker
et Reyes et poursuivait son chemin au ralenti. Je luttai de toutes
mes forces pour conserver mon emprise sur le temps, mais celui-ci me
glissait entre les doigts comme de la fumée dans une brise estivale.
Je
ne pouvais que regarder le projectile avancer tandis que sa cible
n'était pas encore consciente du danger. Les mots me vinrent alors
en un éclair.
—Rey'aziel,
dis-je en forçant mes dents à s'écarter. Te
libero.
En
un instant, Reyes se matérialisa à côté de moi tandis que le
temps fracassait ma barrière avec une férocité vengeresse.
J'entendis un autre coup de feu une microseconde avant d'entendre le
chuintement métallique de l'épée de Reyes.
Sa
robe noire, qui ondoyait comme la vague d'un océan, engloutit la
moitié de la pièce tandis qu'il abattait sa lame avec la grâce
d'un golfeur pro.
Walker
se figea et écarquilla les yeux, incrédule. Il baissa la tête en
se demandant ce qui n'allait pas, vu que Reyes tranchait toujours à
l'intérieur. Il n'y avait aucun trauma externe, aucune blessure
horrible comme une plaie béante ou du sang qui jaillissait partout.
Il ne comprenait sans doute pas pourquoi il souffrait tellement et ne
pouvait plus bouger. J'aurais aimé qu'il puisse voir Reyes,
l'imposante présence de sa robe et ce qui se cachait en dessous.
Puisqu'il en était incapable, Walker ne comprit pas qui le souleva
pour le balancer à l'autre bout de la pièce. Les murs tremblèrent
lors de l'impact. Je me rendis compte alors que je ne voyais plus le
corps physique de Reyes. J'espérais seulement que les balles avaient
atteint des zones moins stratégiques que ne l'avait fait son épée.
Il fallait plus que deux pruneaux pour abattre Reyes.
Puis,
il se tourna vers moi et baissa son capuchon, dévoilant le plus beau
visage que j'avais jamais vu. Il s'agenouilla et prit le mien dans
ses mains.
—Dutch,
je suis tellement désolé.
— Désolé
? essayai-je de répéter.
Mais
ma bouche et ma gorge étaient trop pleines de sang pour laisser
passer des mots. Je sombrai alors dans l'oubli et je m'endormis,
enfin.
L'extrait :
L'inquiétude
jaillit en moi. Je n'avais jamais eu peur de quelqu'un de toute ma
vie, enfin, à part Reyes, mais j'eus un véritable mouvement de
recul en entendant le nom de Walker. À cause de cela, j'eus
l'impression qu'il m'avait dérobé quelque chose de précieux. Une
espèce d'innocence, ou peut-être d'arrogance. L'un ou l'autre.
— Il
ne peut plus aller nulle part et il ne fera plus jamais de mal à
personne, me dit Reyes.
J'étais
certaine qu'il avait raison mais, bizarrement, ça ne m'aidait pas
beaucoup. Il se rapprocha de moi et fit courir le bout de ses doigts
sur mon bras qui guérissait. Je bougeais déjà légèrement les
doigts.
—Je
suis tellement désolé.
— Reyes...
—Je
ne savais pas qu'il irait aussi loin quand il déciderait de s'en
prendre à toi.
J'eus
l'impression de me prendre un mur, tout à coup. Mentalement, je
reculai d'un pas. C'était bizarre de me dire ça.
—Comment
ça ?
—Je
savais qu'il tenterait quelque chose, expliqua-t-il en fermant les
yeux d'un air de regret. Mais pas ça. J'ignorais... Et comme j'étais
entravé...
—Comment
ça « quand il déciderait de s'en prendre à moi » ?
Reyes
baissa la tête. Brusquement, je compris, et j'eus l'impression de
recevoir un coup de batte de base-ball à l'arrière du crâne.
—Oh,
mon Dieu, ce que je peux être bête, parfois. J'arrive à me
surprendre moi-même.
—Dutch,
si j'avais su...
—Tu
m'as tendu un piège.
Toujours
tête baissée, il s'écarta de moi.
—J'ai
servi d'appât. Vraiment, est’il possible d'être stupide à ce
point-là ?
J'essayai
de m’asseoir, mais la douleur envahit mon bras. Et ma cage
thoracique. Et ma jambe. Et mon visage aussi, bizarrement. C'était
trop tôt, même pour moi.
—Je
ne savais pas où il était ni où le trouver. Tu m'avais entravé,
tu te souviens ? Mais je savais qu'en faisant assez de bruit, il
arriverait en courant. J'avais l'intention d'être présent quand ça
se produirait. Je te suivais partout. Et puis, j'ai perdu ta trace.
— Reyes,
il a menacé Cookie et Amber. Il les aurait tuées.
— Dutch...
— Ça
n'impliquait pas que moi... ou toi, d'ailleurs.
—Si
j'avais su... si j'avais pensé un seul instant...
—Mais
tu n'as pas réfléchi. C'est ça, le problème. Il y eut un pic de
colère en lui.
—Tu
m'as entravé, protesta-t-il.
—Je
t'ai entravé il y a deux semaines, répliquai-je, tout le côté du
visage en feu à cause de l'effort. Pourquoi n'es-tu pas parti à sa
recherche avant ?
—Je
ne savais pas. (Il se passa la main dans les cheveux d'un geste plein
de frustration.) Comme le reste du monde, je croyais qu'il était
mort.
— Dans
ce cas, comment as-tu découvert la vérité ?
Il
parut gêné.
—Ça
amusait beaucoup les démons de savoir que j'avais passé dix années
de ma vie humaine derrière les barreaux pour un crime que je n'avais
pas commis. Ils en ont parlé pendant qu'ils me torturaient. Avant
ça, je n'en avais aucune idée. Ensuite, tu m'as entravé, et je
n'ai pas pu me lancer à sa poursuite.
—Alors
tu m'as tendu un piège ?
—Je
nous ai tendu un piège à tous les deux, Dutch. Je n'avais pas
l'intention de te lâcher d'une semelle, mais ton petit copain te
collait aux fesses partout où tu allais. Si j'étais resté avec
toi, j'aurais été arrêté.
L'ironie
de la situation ne m'échappait pas. D'abord mon père, et à présent
Reyes. Quand retiendrais-je la leçon ? Que fallait-il donc pour que
je voie enfin la vraie nature d'un homme ?
Moi,
la seule personne sur Terre capable de voir à l'intérieur de l'âme
des hommes ! Moi qui sentais leurs peurs les plus profondes et qui
voyais la couleur de leur valeur !
—J'ai
juste une dernière question.
—OK.
— Pourquoi
tu ne me l'as pas dit, tout simplement? Franchement, tu ne vaux pas
mieux que mon père. Qu'est-ce que vous avez, vous les hommes, à ne
pas savoir être francs et dire la vérité, putain ?
Il
pinça les lèvres avant de répondre.
—Je
ne te faisais pas confiance.
— Quoi ?
—Tu
m'as entravé, Dutch. En plus, honnêtement, si tu avais la moindre
idée de ce dont tu es capable, tu pourrais bien mieux te défendre.
D'ailleurs, il va falloir que tu t'y mettes. (Il me transperça d'un
regard froid.) Cette guêtre ne va pas t'attendre.
—Quelle
guerre ? demandai-je, horrifiée. La tienne ? Celle que tes
anciens potes de l'enfer ont commencée ? (Je secouai la tête
dans la mesure du possible.) Je ne veux rien avoir à faire avec ça.
J'en ai fini. Avec toi. Avec toutes ces conneries.
—Dutch,
tu es la seule chose qu'ils veulent. Ils en ont aptes le portail, et
c'est toi. Or, ils ont trouvé un moyen de te détecter, de te
retrouver. (Il se pencha sur moi, les sourcils froncés en signe de
colère ou de douleur, ou des deux.) Il faut vraiment que tu
découvres de quoi tu es capable, et il faut que tu le fasses
maintenant. Arrête de déconner avec ces humains. Tu dois te
concentrer sur ta vraie mission.
—Ces
humains sont ma vraie mission.