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mardi 18 novembre 2014

Douce revanche - Nora Roberts






Les odeurs sont parfois les sensations les plus féroces. Elles peuvent éveiller des souvenirs depuis longtemps enfouis ou plus profond de soi et que l'on croit oubliés.












La presse people est en ébullition : la plus belle femme du monde, la star Phoebe Spring, épouse Abdul ibn Faisal Rahman, le roi du Jaquir, un royaume niche dans les sables du désert. En gage de son amour, Abdul offre à sa promise le fabuleux collier Le Soleil et la Lune. Un vrai conte de fées. Qui tourne bientôt au cauchemar. Car Phoebe n'a pu donner qu'une fille au roi. Méprisée, brutalisée, reléguée au fond du harem, la belle Phoebe n'a plus qu'une obsession : s'évader avec Adrianne, sa fille adorée. Des années plus tard, Phoebe et Adrianne ont enfin réussi à se libérer du joug d'Abdul. Adrianne n'a plus qu'une idée en tête : se venger de son père en lui dérobant Le Soleil et la Lune. Elle ignore qu'elle est suivie comme son ombre par le plus séduisant des policiers... 

 
Nora Roberts est une auteure prolifique. C'est le moins qu'on puisse dire. Certaines mauvaises langues diront trop pour qu'elle les écrivent tous. Je ne sais... après tout, elle ne serait pas la seule : à beaucoup écrire ou à ne pas tout écrire.

En tout cas certains de ses livres sont parmi mes préférés. Cependant, je dois admettre que tout ne se vaut pas. Celui-ci ne m'a pas laissé un souvenir impérissable. Sans être mauvais, il ne reste pas dans notre mémoire.
Essentiellement parce qu'il a vieilli et ça se sent mais le style est toujours bon et efficace.

 




—    Je n’ai jamais fait l’amour. Je n’ai jamais voulu.
—    Je sais. Je l’ai compris ce matin quand vous me parliez de votre père, de ce dont vous aviez été témoin entre votre mère et lui. Rien de ce que je pourrais dire n’en effacera ni n’en adoucira le souvenir, sauf qu’entre un homme et une femme cela ne se passe pas toujours de cette manière. Cela ne doit pas se passer ainsi.

Il appliqua avec douceur sa main sur la joue de la jeune femme. Elle ferma les yeux, se laissa pénétrer par la chaleur de ces doigts sur sa peau. Elle avait toujours dominé ses sentiments, maîtrisé son destin. Ce soir, Philip lui paraissait en faire désormais partie.
—    J’ai peur, murmura-t-elle.
—    Moi aussi.
—    Je ne vous crois pas, dit-elle en rouvrant les yeux. Pourquoi avoir peur ?
Il l’attira de nouveau contre lui, lui caressa les cheveux en s’efforçant de penser à sa fragilité plutôt qu’à la force mentale et physique qui l’avait fasciné dès le début.
—    Parce que vous comptez beaucoup pour moi. Beaucoup trop, peut-être. Nous pouvons passer la nuit à l’analyser, à en discuter. Ou vous pouvez me laisser vous aimer.
Ce n’était pas un choix qu’il lui offrait. Adrianne avait toujours cru à la destinée, qui avait été à l’origine de son départ du Jaquir, et qui déterminerait son retour. Sa destinée voulait maintenant que la jeune femme passe la nuit avec Philip, même si ce ne devait être que cette seule nuit, afin d’apprendre enfin ce qui pousse les femmes à faire don aux hommes de leur cœur - et de leur liberté.
Adrianne prévoyait un déchaînement de passion. La passion, elle la comprenait, elle la connaissait. Son éducation sexuelle avait été faite très tôt par les conversations crues du harem et les allusions grivoises autour d’une tasse de thé. Les femmes se disaient aussi affamées de plaisir que les hommes, bien que trop rarement assouvies à leur gré. Il lui en était resté l’image de corps en sueur entremêlés, d’une agitation frénétique entrecoupée de soupirs, de préférence dans le noir. Aussi, quand Philip posa de nouveau ses lèvres sur les siennes, elle était prête à se laisser emporter par un torrent de sensualité.
Elle s’attendait si peu à un baiser plus léger que l’effleurement d’un papillon qu’elle rouvrit les yeux. Philip vit dans ce regard la surprise mêlée au désir, un désir qui croissait chaque fois qu’il la provoquait en l’embrassant à nouveau, de façon à peine plus appuyée. En refrénant son propre désir, il lui laissait le temps de se ressaisir. Pas de hâte, pas d’agressivité, surtout avec elle, surtout en ce moment. Ce soir, il voulait user de toute la patience, de toute la virtuosité que sa longue expérience des femmes lui avait permis d’acquérir.
Se laissant guider sur ces chemins inconnus qu’elle avait tant redouté de parcourir, Adrianne en découvrit peu à peu les charmes et les émerveillements. Philip prenait, bien sûr, mais il donnait davantage, et les ondes de plaisir qui la parcouraient l’amenaient à donner à son tour. Tout était nouveau pour elle et, pourtant, étrangement familier. La sensation de ce corps d’homme contre le sien n’avait rien d’effrayant, contrairement à ce qu’elle avait craint. Le mot viol ne lui vint pas même à l’esprit lorsqu’il la toucha à l’endroit qu’aucun homme n’avait jamais touché.
Outre le plaisir des sensations et celui de leur découverte, un sentiment de plénitude, si intense qu’il l’étouffait, la laissait sans recours contre sa propre volonté, dont le contrôle lui échappait. Elle s’était attendue à une douleur, au moins à une gêne, mais elle n’éprouvait rien de plus que ce sentiment confus qui la désorientait et accroissait son besoin de l’éprouver toujours plus intensément. Elle luttait et se contractait quand soudain elle se sentit se relâcher, s’abandonner avec avidité au torrent de plaisir qui la balayait, lui apportait une ivresse de liberté et la soif de s’y livrer sans retenue. Et lorsqu’enfin Philip se fondit en elle, le choc de la surprise fut si bref qu’elle n’éprouva plus qu’un plaisir trop intense pour ne pas vouloir le partager avec l’homme qui le lui offrait.
Celui-ci ne pouvait pas lui avouer que, en cet instant, leurs corps lovés, imbriqués l’un dans l’autre, il se sentait plus vulnérable qu’il ne l’avait jamais été dans sa vie - et prêt à prendre pour elle tous les risques.
Plus tard, étendue près de lui, Adrianne tenta de remettre de l’ordre dans le chaos de ses pensées. Ce qu’elle venait de vivre ne devait pas prendre une telle importance et ne pourrait rien changer. Il était ridicule de croire autre chose. Dans son pays natal, une femme de son âge serait déjà mariée depuis des années et, si Dieu l’avait voulu, aurait déjà porté de nombreux enfants. Ce qui s’était passé ce soir entre Philip et elle n’était qu’une fonction naturelle. Une femme n’existait, après tout, que pour donner à un homme du plaisir et des fils...
Elle réagissait en femme du Jaquir ! En prendre conscience la choqua au point de lui laisser dans la bouche un goût si amer qu’il estompa celui de l’homme couché à côté d’elle. Atterrée, elle se tournait, prête à fuir, quand elle sentit le bras de Philip se poser sur elle.
Appuyé sur un coude, il étudiait le visage de la jeune femme. Sous l’éclat de la sensualité assouvie, il discernait des secrets, des regrets peut-être, qu’il ne pouvait deviner.
—    Je t’ai fait mal ?
Ce n’était pas sa première pensée, mais il n’était pas plus disposé qu’elle à livrer ses propres secrets.
—    Bien sûr que non.
Il lui caressa une joue. Elle ne se déroba pas, ne l’encouragea pas non plus. Il aurait voulu qu'elle parle, qu’elle lui donne un simple signe des sentiments qu’elle éprouvait, de ce qu’elle attendait de lui. Mais elle garda le silence, un silence qui s’éternisa, de plus en plus malaisé.
—    Tu ne m’oublieras pas, tu sais, dit-il à mi-voix. On n’oublie jamais son premier amant.
Il y avait juste assez de hargne dans ses paroles pour qu’elle comprenne qu’il se dominait, pas assez pour y déceler de la peine.
—    Non, je ne t’oublierai pas.
Il la tourna vers lui. Leurs regards se croisèrent, exprimant chacun une sorte de défi.
—    Mieux vaut s’en assurer, dit-il avant de lui donner un baiser d’une voracité presque agressive.