Puisqu'elle
n'a pas croisé le fer, elle ne mourra pas parle fer. Cependant, pour
avoir procédé à ce couronnement illégal, qu'elle soit enfermée
dans une geôle de pierre et de métal en forme de croix, puis
suspendue et exposée aux éléments à Berwick, afin que, dans la
vie comme dans la mort, elle offre perpétuellement un spectacle et
un avertissement aux voyageurs.
1306.
Edouard Ier d'Angleterre et Robert Bruce se disputent le trône
d’Écosse. Décidé à prendre son rival de court, Bruce fait
mander la comtesse Isabella MacDuff qui, de par son mariage, détient
le droit héréditaire de couronner les rois. Elle sera protégée
par un de ses meilleurs mercenaires, Lachlan MacRuairi, surnommé la
Vipère. En dépit de la méfiance que lui inspire cet ancien pirate,
Isabella se sent indéniablement troublée par sa présence. Mais
pourra-t-elle compter sur lui lorsque, tombée dans le guet-apens
tendu par ses ennemis, elle sera condamnée au sort le plus funeste ?
L'extrait :
Ils
venaient la chercher.
Bella
entendit la porte s'ouvrir et le constable entra, flanqué de
plusieurs gardes. Malgré tout, son esprit refusait encore de le
croire.
Ce
n'était pas possible. Ce ne pouvait être vrai.
Ils
construisaient son étrange prison depuis des semaines. Durant tout
ce temps, elle s'était convaincue que quelqu'un interviendrait et
mettrait un terme à cette barbarie déguisée en justice. Quelqu'un
la secourrait.
Edouard
changerait d'avis, comme il l'avait fait pour la fille et l'épouse
de Robert de Bruce. Il atténuerait sa peine et l'enverrait dans un
couvent. Son ancien mari, le comte de Buchan, finirait par surmonter
sa colère et plaiderait sa cause.
Même
si ses ennemis restaient insensibles à son sort injuste, elle
pouvait compter sur ses amis. Son frère était le favori du fils du
roi. Il userait sûrement de son influence. Ou Robert... Robert
interviendrait forcément. Après tout ce qu'elle avait risqué pour
le couronner, il ne la laisserait pas tomber.
Dans
ses pires moments de faiblesse, elle se persuadait même qu'elle
s'était trompée sur le compte de Lachlan MacRuairi. Lorsqu'il
apprendrait ce qu'Edouard projetait de lui faire subir, il viendrait
la chercher. Il trouverait un moyen de la sauver.
Ces
hommes ne pouvaient l'abandonner à un châtiment aussi épouvantable.
Mais
personne n'était venu. Personne n'avait intercédé en sa faveur.
Edouard comptait faire d'elle un exemple. Son mari la méprisait. Son
frère, tout favori qu'il était, n'en était pas moins prisonnier.
Bruce luttait pour sa suivie. Quant à Lachlan... c'était lui qui
l'avait mise dans cette situation.
Elle
était seule avec sa cousine Margaret, qui lui servirait de dame de
compagnie. C'était l'unique concession d'Edouard, obtenue grâce à
son sang noble.
Sir
John de Seagrave, constable du château de Berwick et l'un des
commandants d'Edouard durant la campagne d'Ecosse, s’éclaircit la
gorge. Il était mal à l'aise et fuyait son regard. Apparemment,
même les larbins du roi n'approuvaient pas son sens de la « justice
».
—
Il
est l'heure, ma dame