Ici,
en privé, il pouvait laisser ses sentiments s’exprimer, aussi bien
son amour douloureux que ce désir maladif qui refusait de le
quitter.
Et
aussitôt, sa
fragrance de mâle dédié s’exprima sur sa peau.
Il avait réussi à la retenir dans la voiture, trouvant qu’il
était injuste de la marquer si elle ne voulait plus de lui. Mais
ici ? Tout seul ? Aucune raison de se cacher.
Une
guerre fait rage à l'insu des humains. Six vampires protègent leur
espèce contre la Société des éradiqueurs. Ils sont regroupés au
sein de la mystérieuse Confrérie de la dague noire. Butch O'Neal,
ex-flic à la criminelle, est le seul humain accepté dans ce cercle
fermé. Bagarreur de nature, il n'a pas la vie facile. Mais Butch se
donne corps et âme dans la traque des éradiqueurs, au point d'être
enlevé et torturé pour avoir sauvé un vampire. Laissé pour mort,
il est retrouvé par miracle et la Confrérie fait appel à Marissa,
l'amour de sa vie, pour le ramener. L'amour de Marissa suffira-t-il à
le sauver du mal profond qui gronde en lui ?
Marissa
ne comprit absolument pas pourquoi Butch l’entraîna jusqu’à la
salle de bain au pas de course.
— Butch !
Que se passe-t-il ?
Il
se pencha sur le lavabo, força ses mains sous l’eau du robinet, et
attrapa un pain de savon. Quand il se mit à la frotter, la folle
panique de son visage atteignit ses yeux et durcit sa bouche.
— Mais
enfin, que se passe-t-il ici ?
Marissa
et Butch se retournèrent en même temps vers la porte. Havers
n’avait pas enfilé de scaphandre – et elle ne l’avait jamais
vu aussi furieux.
— Havers...
Son
frère l’interrompit en l’attrapant par la main pour l’entraîner
hors de la salle de bain.
— Arrête
– Aïe ! Havers, tu me fais mal !
Ce
qui arriva ensuite fut si rapide qu’elle ne put tout suivre.
Soudain
Havers… disparut. La seconde précédente, il la tirait par la main
et elle se débattait contre lui, et la suivante Butch le maintenait
écrasé face au mur.
La
voix de Butch était franchement mauvaise quand il gronda :
— J’en
ai rien à foutre que tu sois son frère. Ne la brutalise pas comme
ça. Jamais.
Il
poussa son avant-bras contre le cou de Havers pour que l’autre
comprenne bien.
— Butch,
laisse-le...
— C’est
bien clair ? gronda Butch.
Lorsque
Havers haleta et hocha la tête, Butch le relâcha, marcha jusqu’à
son lit et s’entoura les hanches dans un drap, calmement. Comme
s’il ne venait pas de malmener un vampire.
En
entrant dans la clinique, Vishous se dirigea tout droit vers la salle
de quarantaine. Aucune infirmière ne tenta de l’arrêter, et
lorsqu’il traversa le couloir, le personnel médical s’écarta au
plus vite de son chemin.
C’était
plutôt intelligent de leur part. Il n’était pas de bonne humeur.
La
journée avait été un vrai gâchis. Il n’avait rien trouvé dans
les Chroniques, rien qui approchait un tant soit peu de ce que Butch
avait subi. Rien non plus dans les Traditions Orales. Et pire que
tout, il avait le vague sentiment que le futur se réalignait, que le
destin de certaines personnes se modifiait. Malgré ce que ses
instincts annonçaient, il n’avait aucune vision de ce qui allait
arriver. C’était comme regarder une pièce de théâtre sans que
le rideau soit levé. Parfois, il avait un bref aperçu, une image à
peine esquissée, il voyait un mouvement ou entendait une voix. Mais
il ne comprenait pas l’ensemble, et ses cellules grises tournaient
à vide.
Il
traversa le laboratoire de Havers, entra dans le placard des
accessoires, poussa la porte dérobée. Dans l’antichambre vide, il
ne trouva que les ordinateurs et les moniteurs menant une veille
solitaire.
Et
il s’arrêta net.
Sur
l’écran bleuté juste en face de lui, il vit Marissa sur le lit de
Butch, couchée sur lui. Le flic avait les bras serrés autour
d’elle. Il avait écarté ses genoux pour la caler entre eux et le
couple ondulait d’un mouvement ample et régulier. Vishous ne
pouvait voir leurs visages mais il était évident que leurs bouches
étaient jointes, leurs langues collées l’une à l’autre.
Il
se frotta la mâchoire, vaguement conscient que, sous ses armes et sa
cuirasse de cuir, il avait drôlement chaud tout à coup. Seigneur…
Voilà que la main de Butch remontait vers le cou de Marissa,
soulevait la masse de ses cheveux blonds et caressait sa nuque du
bout des doigts.
Le
mec était sexuellement défoncé… et pourtant, il se montrait si
doux avec elle. Si tendre.
Vishous
pensa à ce qu’il avait vécu la nuit où Butch avait été
capturé. Rien de doux vraiment. Mais aucun des deux partis concernés
n’était venu pour ça.
D’un
geste soudain, Butch roula sur lui-même avec Marissa, la faisant
passer en dessous, puis il eut un mouvement des hanches – comme
pour la prendre. La chemise d’hôpital s’ouvrit, découvrant le
dos musclé et les reins puissants du mâle. Le tatouage, à la base
de sa colonne vertébrale, ondula tandis que l’humain poussait ses
hanches en avant, cherchant à pénétrer. Et alors qu’il frottait
son énorme érection contre elle, les longues mains de la femelle se
mirent à caresser son cul nu.
Lorsqu’elle
y planta ses ongles, la tête de Butch se renversa en arrière pour
pousser sans nul doute un gémissement rauque.
Seigneur…
Vishous pouvait presque entendre le cri de Butch… Oui… il
l’entendait. Et venue de nulle part, une étrange jalousie naquit
en lui. Merde ! Où se plaçait-il exactement dans le scénario ?
La
tête de Butch retomba dans le cou de Marissa, et ses hanches
continuèrent leur danse érotique. Son épine dorsale ondulait, ses
larges épaules se gonflaient, et tout son corps trouva un rythme qui
fit que Vishous ferma d’abord les yeux. Puis plus du tout.
Sous
son mâle, Marissa avait le corps arqué, les yeux clos, le menton
renversé en arrière, la bouche ouverte. Elle était magnifique
ainsi, les cheveux répandus sur l’oreiller ou emmêlés sur les
biceps de Butch. Toute à sa passion, dans sa longue robe pêche,
elle était comme un lever de soleil, une aube, une promesse de
lumière et de chaleur… où Butch se prélassait en la caressant
fiévreusement.
Elle
se détourna et repartit vers la maison, d’un pas rapide. Et un
invité apparut à la porte pour l’accueillir. Rehvenge.
Rehv…
si puissant… si fort… si parfaitement capable de lui donner sa
veine.
Marissa
ne fit pas un autre mètre.
Butch
bondit hors du 4x4, l’agrippa par la taille et la tira jusqu’à
la voiture. Mais elle ne se débattit pas. Pas le moins du monde.
Il
ouvrit le hayon pour la jeter quasiment à l’intérieur. Il entra
avec elle et regarda Rehvenge. Les yeux violets du vampire étaient
lumineux, comme s’il hésitait à intervenir, mais Butch lui jeta
un regard noir et pointa du doigt sa poitrine, le signal universel
entre mâles pour dire : « Reste
où tu es mon pote, et tu garderas toutes tes dents. »
Les lèvres de Rehv proférèrent manifestement un juron, mais il
hocha la tête et se dématérialisa.
Butch
sauta dans le coffre du 4x4, baissa le hayon et s’étendit sur
Marissa avant que le plafonnier ne s’éteigne. C’était un peu
serré à l’arrière, il avait les jambes tordues à un angle
curieux, les épaules heurtèrent quelque chose, probablement
l’arrière du siège. Mais il s’en foutait complètement, et elle
aussi apparemment. Marissa s’offrait sans contrainte, enroulant ses
jambes autour de ses hanches, ouvrant la bouche dès qu’il
l’embrassa brutalement.
Butch
se retourna pour qu’elle se retrouve sur le dessus, prit une
poignée de ses cheveux dans son poing et l’attira contre sa gorge.
— Mords,
aboya-t-il.
Nom
d’un chien. Elle le fit et pas qu’un peu.
Il
ressentit une vive douleur quand ses canines tranchèrent sa veine et
dès qu’il fut ainsi pénétré, son corps eut un violent
soubresaut, ce qui ouvrit encore davantage sa chair. Mais c’était
bon, c’était fantastiquement bon. Elle buvait à longues gorgées
et la satisfaction de la nourrir l’enivrait presque.
Il
passa la main entre leurs deux corps et posa sa paume sur son sexe
brûlant. Elle poussa un gémissement, et il releva son autre main
vers ses seins. Que Dieu la bénisse, elle rompit le contact
assez longtemps pour enlever son chemisier et détacher son
soutien-gorge.
— Ton
pantalon, dit-il d’une voix rauque. Descends ton pantalon.
Elle
se déshabilla avec des gestes maladroits dans l’espace confiné,
tandis qu’il descendait sa fermeture et libérait son sexe. Mais il
n’osa pas le toucher, il était déjà trop proche de l’explosion.
Entièrement
nue, elle se mit à califourchon sur lui, ses yeux pâles et lumineux
devenant presque flamboyants dans l’obscurité. Elle avait du sang
– son sang
...sur les lèvres et il leva la tête pour l’embrasser, puis
positionna son corps pour qu’elle soit à la bonne place. Il
renversa la tête en arrière quand ils s’emboitèrent et elle
perça à nouveau son cou de l’autre côté. Il leva les hanches et
trouva un rythme si sauvage qu’elle dut se mettre à genoux pour
pouvoir continuer à boire.
Un
orgasme fracassant le fit rapidement exploser.
Et
dès que ce fut fini, il était prêt à recommencer.
Et
c’est ce qu’il fit.
(...)
Quand
Marissa eut pris ce dont elle avait besoin, elle s’écarta de Butch
et s’étendit à côté de lui. Il était sur le dos, regardant le
plafond de l’Escalade, une main posée sur la poitrine. Sa
respiration était encore rauque, et ses vêtements en désordre et
tout froissés, la chemise remontée sur le ventre. Son sexe luisait
sur son estomac plat, et son cou était à vif – bien qu’elle ait
léché les entailles.
Elle
l’avait utilisé avec une sauvagerie qu’elle n’aurait jamais
cru posséder, sa soif de sang les précipitant tous les deux dans
une folie animale et primaire. Et maintenant, après le choc, elle
sentait son corps assimiler ce qu’il lui avait donné, et ses
paupières étaient lourdes.
Si
bon. Il avait été si bon.
— Reviendras-tu
me voir pour boire ?
La
voix de Butch, toujours un peu rocailleuse, était cassée ce soir,
presque au point de l’extinction.
Marissa
ferma les yeux, la poitrine si douloureuse qu’elle avait du mal à
respirer.
— Parce
que je préfère que ce soit moi plutôt que lui.
Oh…
Ainsi ce n’était qu’un acte de possessivité vis-à-vis de
Rehvenge, et elle n’avait rien à voir là-dedans. Elle aurait dû
s’en douter. Elle avait bien vu le regard que Butch avait jeté à
Rehv juste avant de monter dans la voiture. Il avait la rancune
tenace.
— Aucune
importance, dit Butch en remettant son sexe dans son pantalon avant
de remonter sa fermeture. Ça ne me regarde pas.
Elle
n’avait rien à répondre, mais il ne sembla pas s’en soucier. Il
lui rendit ses affaires, et ne la regarda pas tandis qu’elle se
rhabillait. Et dès qu’elle fut couverte, il ouvrit le hayon.
L’air
froid pénétra dans la voiture… et ce fut seulement alors qu’elle
remarqua quelque chose. L’intérieur de la voiture sentait la
passion et le sang – de lourdes et épaisses odeurs qui étaient
attrayantes. Mais il n’y avait aucune trace de sa fragrance de mâle
dédié. Pas une seule trace.
Elle
ne put même jeter un seul regard derrière elle tandis qu’elle
s’éloignait.